• Le soleil venait de se lever et une voix étrangement familière résonnait dans mon sommeil.

    -Cailín, réveille-toi !

    Cailín... Qui est-ce ? Moi ? Pourtant, j'étais certaine que je ne m'appelais pas ainsi. Comment était-ce déjà ?

    -Cailín, reviens ! Nous devons raconter nos histoires ! Souviens-toi !

    Il ne m'en fallu pas plus pour me réveiller. Lorsque j'ouvris les yeux, je vis de vieilles connaissances près de moi, le sourire aux lèvres. Je les reconnaissais et pourtant, elles avaient changé et... moi aussi. Je le sentais bien. Quelque chose en moi était différent. En me levant, je me dirigeais vers un miroir et me confrontai à la réalité : j'avais grandi, ou plutôt vieilli –étant donné que ma croissance s'était arrêtée depuis longtemps, me laissant au mètre soixante-trois, taille respectable pour une jeune femme mais qui avait ses inconvénients.
    Je regardais à nouveau celles qui m'avaient sortie de mon sommeil et les interrogeai du regard.

    J'appris que oui, j'avais changé, mais qu'elles ne connaissaient pas toute l'histoire. Je n'avais plus le même nom qu'avant, mais je restais la même, au fond. J'avais pris en maturité, j'étais adulte et dans le monde du travail. J'avais un chat, un petit-ami aimant et aimé, une voiture et des responsabilités. Ma soif d'écriture ne s'était jamais éteinte, mais par manque de temps, je m'y consacrai moins.
    Elles me rappelèrent ce temps lointain, ce temps de candeur où nous rêvions d'être dans les bras d'étranges créatures issues d'un anime cher à notre cœur. Cet anime qui, retravaillé aujourd'hui, pourrait avoir tellement d'impact. Je me souviens que la frustration de n'avoir jamais eu le plaisir de voir tels éléments de développés ne m'a jamais quitté. Cette envie folle de réécrire, d'améliorer cet anime à mon image. Cette obsession de mettre en lumière ce personnage et d'y inclure mon personnage à ses côtés. Ce plaisir de pouvoir converser avec eux à travers les mots et mon imagination. Tout cela ne m'a jamais quittée. Les personnages de Tokyo Mew Mew sont restés endormis bien patiemment au fond de moi, attendant tranquillement que je les fasse revivre à ma façon.

    Il est temps pour moi, je pense, de recommencer. Oh ! Bien sûr, le récit qui se trouvera ici sera bien différent de ce que j'ai pu faire avant. D'abord, mon personnage aura changé de prénom, l'ancien ne lui correspondant plus. Kukki, cette héroïne au physique inchangé, va vivre milles aventures tant épiques qu'amoureuses.

    Venez, installez-vous, lisez le récit d'une jeune femme nostalgique


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  • 2021:

    La Terre est en proie à une tragédie épidémique sans précédent. Le monde entier est infecté. Pauvres et riches, jeunes et vieux, hommes et femmes. Personne n'est épargné. Parmi les cadavres que l'on entasse et les sombres jours d'une planète se mourant à petit feu, subsiste un espoir. Infime, microscopique à l'échelle mondiale.

    Quelque part, au Japon, le jeune Ryô Shirogane et son acolyte, Keiichirô Akasaka, fomentent une contre-attaque contre la source du mal épidémique. Les responsables ? Trois aliens – Pai, Kisshu et Tart – venus d'une planète lointaine chargée de conquérir la Terre pour y installer les leurs. S'ils devaient, initialement, chercher un terrain d'entente avec l'humanité, la santé déplorable de la planète les poussa à faire un autre choix sous l'impulsion d'un maître mystérieux surnommé le Deep Blue.

    Parallèlement, alors que Ryô et Keiichirô lancent le projet mew-mew, quelque part dans un complexe secret défense, les hommes du richissime Hector continuent leurs longues expériences sur une jeune femme venue d'ailleurs surnommée Kukki. Cette dernière, naïve et candide, recueillit depuis sa tendre enfance par ce milliardaire excentrique finira par découvrir que son destin n'est pas de rester enfermée sous terre, à l'abri de tous.


    Sommaire:

    Chapitre 01 - Chapitre 02 - Chapitre 03 - Chapitre 04


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  •  

       Encore une fois, ils m'endorment. Une partie de moi m'ordonne de résister, comme toujours, mais je n'en montre rien. C'est comme ça. Depuis des mois déjà. Deux fois par semaine, après mon deuxième repas, ils m'endorment. Ils me parlent très peu, aussi. Mais je pense que c'est parce que je suis différente d'eux. Tant mentalement que physiquement. Je ne leur ressemble pas. Et lorsque j'eus envie de comprendre ce que j'étais, Hector m'a persuadé d'arrêter.

       Hector... Mon sauveur. Du moins, c'est comme ça qu'il se présente à moi depuis toujours. C'est lui qui m'a trouvé dans les décombres du véhicule étrange de mes parents biologiques. C'est lui, qui m'a extirpé du feu, qui m'a arraché aux bras du cadavre de ma mère. S'il n'avait pas été là, je serais morte moi aussi. Je n'ai jamais su si je lui étais vraiment reconnaissante. Après tout, je n'étais qu'un bébé lorsque tout cela est arrivé. Qui peut dire que ce n'est pas lui qui a provoqué tout ça ?

       Un accident mortel et resté caché de tous. Voilà tout ce que je savais de ce jour. Du reste, je ne connais seulement que ce qui m'entoure. Je ne connais le ciel et ses astres que par des images. Le monde extérieur, pour moi, est un univers inconnu et effrayant. Ils ne m'ont jamais autorisé à y aller. Pas même le bout de mon nez. C'est trop dangereux pour moi, d'après eux. Je suis las de tout ça. Vingt-et-un ans sous terre, c'est terriblement long. Je pense, tout de même, que je suis en forme. Ils prennent soin de moi. Hector prend soin de moi.

       Lorsque je me réveillerais, il sera là, comme toujours, un sourire aux lèvres. Il me demandera comment je vais et je répondrais encore que tout va bien. Et puis, je trouverais la force de lui poser quelques questions sur mes origines, le monde extérieur, la raison de tout cela. Il ne répondra pas, bien sûr, car il ne le fait jamais. Je me retrouverai encore avec des questions sans réponses. Mais Hector, à défaut de vouloir ou pouvoir répondre, me fera la promesse de revenir. Ça devrait me suffire non ? Alors pourquoi est-ce que je sens la colère envahir mon être ? Ou bien est-ce un effet secondaire de cet air soporifique que j'inspire.

       Non, je crois que j'en ai assez. Je n'en peux plus de tout ce cirque. Ça ne rime à rien tout ça. Ils me cachent des choses. Je le sens. Je ne suis pas aussi idiote que ce qu'ils croient. Mais je suis las... Oui, je me sens fatiguée. Je vais dormir encore une fois, pour leur faire plaisir et puis, après, j'aviserai.

     

       La respiration de la jeune femme se fit plus profonde, plus calme. Un court instant, Jon avait eu peur que le produit ne fasse pas effet. Elle avait tardé, cette fois et sa respiration s'était accélérée un court instant, ses poings s'étaient serrés. Avait-elle eu mal ? Le scientifique haussa les épaules. Le principal, c'était qu'elle dormait maintenant, profondément. Lui et ses collègues pouvaient se mettre au travail.

       Il attrapa une seringue et plongea l'aiguille dans un petit flacon de verre. Cette fois, la concentration du virus était triplée. Lui et ses confrères avaient prévenu leur patron de la dangerosité de la dose, mais il avait refusé de les entendre. Son expérience vivante saurait résister. Personne ne l'avait contrarié, mais très peu avait autant la foi que cet excentrique.

       Jon regarda la jeune femme sur la table d'opération. Il l'avait vu grandir, devenir une femme. Il s'y était attaché même s'il lui avait très peu parlé. Mais ça, c'étaient les ordres qu'il avait reçus. Ne pas parler avec l'extraterrestre même si elle le demandait. Seul Hector y était autorisé. Enfin, avant, il y avait une femme aussi. Mais elle avait mystérieusement disparu dès que la jeune femme avait atteint l'âge de seize ans. Nulle ne pouvait dire pourquoi, sauf le patron peut-être. Mais ils ne diraient rien. Hector Saibhir était un homme secret. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il est devenu, en partie, milliardaire. Ça et d'autres choses encore, bien plus sombre.

       Le scientifique réprima un frisson et se concentra à nouveau sur sa tâche. Il interrogea ses collègues du regard. Ils étaient pleins d'appréhension, mais prêts. Jon allait, maintenant, déverser une dose peut-être létale dans le corps de l'étrangère. Ce n'était pas un homme croyant, mais, tandis qu'il appuyait sur la seringue pour la vider, il se surprit à prier une entité supérieure pour que rien de fâcheux n'arrive.

     

       Sa prière fut, sans doute, entendue, peut-être. Durant ces premiers instants en tout cas où l'aiguille s'était retiré du bras albâtre de l'expérience. Le temps s'était comme suspendu. Lui et ses confrères avaient cessé de respirer quelques instants. Les secondaires passèrent sans rien d'anormal à signaler. Alors, Jon expira. Trop tôt, peut-être.

       

       Je sens encore cette piqûre transpercer mon bras. Le liquide qui en découle est froid. Je le sens courir dans mes veines. C'est étrange, inquiétant. Je ressens tout mon corps qui se bat contre cette substance inconnue. Pourtant, j'étais certaine de m'être endormie. Est-ce un songe ? J'ai l'impression, soudain, que mon corps me brûle de l'intérieur. Ça fait mal, mais je n'arrive pas à bouger. Je n'arrive pas à l'exprimer. En revanche, mes pensées se bousculent. Des images, par milliers, défilent sous mes yeux. Je vois deux visages inconnus me sourire. Mais ce ne sont pas des sourires heureux. Non, ils sont inquiets. Une femme s'avance vers moi pour m'embrasser le front. Elle...Elle est comme moi. Et l'homme qui s'approche à son tour l'est aussi. Qui sont-ils ? Et puis, je vois le noir, le néant, parsemé de point blanc. Est-ce la nuit ? L'ai-je déjà vu un jour ? Et où est la lune alors ? Pourquoi rien ne brille ? Des cris. Je les entends. Ils sont paniqués. La femme me prend dans ses bras et me sert très fort. Nous tombons. J'ignore comment je le sais, mais j'en suis sûre. Et puis, un choc. Énorme. J'ai peur, j'ai mal. Je vois du feu qui nous entoure. La femme qui me tenait ne bouge plus. Je ne vois plus l'homme qui était à ses côtés. Alors je hurle. Peut-être pour qu'elle se réveille. Combien de temps ? Enfin, on me déplace. Mais ce n'est pas la femme. C'est... C'est Hector. Plus jeune, moins guindés. Il me regarde avec fascination. Je ne pleure plus. Je suis intriguée par cet homme qui me tient dans ses bras.

    -Monsieur ?

       Un homme avance vers mon sauveur, inquiet. Je crois que c'est Jon. Lui aussi est plus jeune.

    -Nous venons de faire une découverte majeure, mon brave Jon ! Majeure, mais secrète !

    -Sans vouloir vous offenser monsieur, l'impact a fait beaucoup trop de bruit et trop de fumée pour ne pas passer inaperçu.

    -Et bien, qu'est-ce que vous attendez alors ? Faites le ménage vous et les autres ! Débarrassez-vous des corps !

    -Monsieur, la créature du côté conducteur semble encore vivante.

    -Tuez-la, alors ! Abrégez ses souffrances.

    -Et... et cette chose que vous tenez ?

    -C'est la seule chose qui restera en vie. Elle nous sera utile.

       Ce souvenir me sert le cœur. Est-il vrai ? Est-ce mon imagination ? Pourquoi ? Oui, pourquoi est-ce qu'il a fait ça ? Que suis-je ? Je ne comprends pas. Je ne comprends plus. Je suis perdue et en colère. J'ai mal. Ils me font mal. Je revois le visage angélique d'Alaïs. Ma fausse maman. Elle aussi a disparu. Pourquoi ? Et j'entends ces voix monocordes et froides concluant des expériences qu'ils m'ont fait subir. Ce n'est pas normal. N'est-ce pas ? Tout ce que je vis n'est pas normal...

     

       L'agitation avait envahi tout le corps de la jeune femme. Elle s'était cambrée en un surprenant soubresaut, ses yeux semi-ouverts ne laissaient voir que le blanc de ses yeux. Quelque chose n'allait pas. L'électrocardiogramme s'emballait. Jon pensa, en reculant de surprise, que lui et ses confrères avaient raisons. Ils n'auraient jamais dû lui injecter une dose si grande. À l'instar des autres, il resta pétrifié de surprise, les yeux grands ouverts sur le corps agité de l'expérience. D'où il était, il pouvait voir le front de la jeune femme perlé de gouttes de sueurs.

    -Elle a un accès de fièvre, réussit-il à crier.

    Aussitôt, d'autres hommes en blouses blanches sortirent de derrière une porte. Ils doivent la maintenir. Prendre sa température et lui donner ce dont elle aurait besoin. Ils attrapèrent difficilement ses membres pour les plaquer contre la table d'opération. Mais, même comme ça, elle continuait à s'agiter. Cependant, Jon arriva à la contrôler avec son thermomètre électrique.

    -Quarante degrés...

       Dans sa voix, il y avait de l'étonnement, mais aussi de la culpabilité et de la renonciation. Ils venaient de la tuer. Les autres le regardèrent tout aussi estomaqué que lui. Il n'y avait plus rien à faire. C'était certains. Il était inutile d'essayer. Ils devaient simplement continuer à la maintenir jusqu'à ce qu'elle rende son dernier souffle. Mais alors qu'ils pensèrent être témoin de ses derniers instants, la jeune femme ouvrit les yeux, parfaitement lucide, mais emplis d'une rage destructrice.

       C'était enfin l'heure de prendre une pause. Aussitôt que midi avait sonné, les deux jeunes gens avaient cessé de travailler sous le conseil de l'aîné. Aujourd'hui était un grand jour. Il ne fallait rien négliger. Pas même un repas. Tandis que le plus âgé s'affairait à la cuisine, le plus jeune s'était installé sur un canapé dans leur salle d'opération, au sous-sol. En face, l'écran noir d'une télévision éteinte. Il hésita quelques instants. Les informations n'étaient jamais bonnes ces derniers jours. Elles étaient même inquiétantes. Mais bientôt, tout cela changerait. Dès que leur projet serait mené à terme.

       Il décida, finalement, d'allumer le téléviseur. Mais il regretta presque aussitôt. À l'écran, au premier plan, une journaliste bien apprêtée tenait un micro en dessous ses lèvres pour se faire entendre. En arrière-plan, un feu se consumait au milieu d'un désert. Sans doute aux Etats-Unis. Il y avait également quelques autres journalistes accompagnés de leur caméraman tout autour, à la recherche d'un meilleur angle – l'angle choc – qui permettrait au téléspectateur de ne jamais oublier ces images.

    -Une terrible explosion s'est fait entendre ce matin dans les petites villes aux alentours du désert. Un bruit inquiétant tout aussi bien les habitants que les autorités. Après investigation, il s'est avéré que le bruit provenait exactement de dernière moi. Actuellement, un feu coriace fait rage, mettant en déroute les pompiers et volontaires alentour. À cette heure-ci, nous ignorons s'il y a des blessés. Mais nous pouvons vous dire que cette parcelle est la priorité du richissime Hector Saibhir. Le milliardaire excentrique n'a, pour l'instant, prononcé aucun communiqué à ce sujet, pas même sur les réseaux sociaux. Cependant, nous pouvons nous demander si la cause de cette explosion est le résultat d'un des nombreux projets ambitieux du milliardaire ou s'il a été victime d'une attaque de forces ennemies. Rappelons que depuis le début de l'épidémie, les pays communistes n'ont eu de cesse de menacer notre monde d'une guerre sans précédent. Nous ne pouvons donc pas écarter la théorie d'un premier missile ennemi envoyé. Alors accident ou début d'une nouvelle guerre ? Pour le savoir, restez avec nous sur...

       La journaliste n'eut pas le temps de finir sa phrase que déjà le jeune homme changeait de chaîne. Le même reportage, dans un angle différent. Les mêmes propos différemment formulés. Le monde allait mal et les informations n'informaient plus. Il fallait trouver la phrase choc, la théorie choc. Celle qui effraie plus encore. Mais le monde allait déjà mal depuis le début de la pandémie. Était-il nécessaire d'en rajouter ?

       Il zappa longuement à la recherche d'une chaîne télévisée qui ne parlait ni de cet énième accident théoriquement belliqueux, ni du nombre de morts déploré depuis le début de l'émergence de cette soudaine maladie. Une recherche difficile, mais pas impossible. Il tomba enfin sur une émission tout en légèreté sur la vie maritime des dauphins. Bien sûr, il y aurait forcément une parenthèse sur l'intervention néfaste de l'homme dans les milieux naturels. Mais ça ne serait que l'affaire de quelques minutes et, qui sait, peut-être que lui et son ami auraient fini avant.

       La porte s'ouvrit, justement à ce moment, laissant place à un homme à la longue chevelure châtaigne attaché en une queue simple. Il tenait entre les mains un plateau sur lequel était posé deux assiettes emplit de met délicieux et deux grands verres d'eau.

    -Quelles sont les nouvelles ? demanda-t-il en déposant son fardeau sur une petite table basse avant de s'asseoir à côté de son ami.

    - Rien de bien intéressant, répondit le plus jeune en remettant en place une de ses mèches blondes. Un accident dans un désert aux États-Unis, mais hormis le nom du propriétaire, ils ne savent rien. Alors ils théorisent encore et toujours.

    -Ah, je vois. Et donc, tu as décidé de regarder un documentaire sur les dauphins ?

    -Un souci avec ça, Keiichiro ?

    -Oh non. Pas le moins du monde Ryô. Les documentaires sur la vie maritime ont un côté apaisant, je trouve. Ce sera efficace avant le lancement de la première phase.

       Les deux jeunes hommes n'échangèrent plus un mot. Seulement un sourire. Ils entamèrent leurs repas, uniquement éclairés par l'écran bleuté de la télévision. Un peu plus loin, leurs ordinateurs affichaient quelques points se mouvant à chaque clignotement. Lorsqu'ils seront, tous les cinq, au même endroit, alors, la phase une pourra commencer.

       C'était fini. Tout était terminé. Enfin. Il lui avait fallu vingt-et-un an et l'injection de cet étrange produit pour trouver cette force de rébellion. Dommage qu'il y ait eu des morts. Ce n'était pas agréable de se savoir la cause d'une fin. Elle ne se rappelait pas tout exactement. Seulement qu'elle s'était réveillée, pleine de rage, prête à se battre. Elle se souvint également des hommes qui la tenaient, projetés contre les murs de la pièce et puis cette explosion qui sembla provenir d'elle. Puis, il n'eut rien d'autre jusqu'à son réveil au milieu de ce désert avec ce sac plein d'affaire et de billet vert sur lequel était gravé les initiales H.S. Hector Saibhir. Avait-il vu ce qu'elle avait fait ? Avait-il une explication ? L'avait-il sauvé puis abandonné ? Si elle n'était jamais sortie, elle connaissait quelques règles du monde extérieur et déjà, elle se souvint de son anormalité physique. Elle devait la cacher et vite. Mais alors que ses doigts se promenaient sur ses tempes, elle ne ressentit rien. Enfin si, il y avait bien quelque chose. Mais c'était plus petit, plus discret plus... comme eux tous. Comment cela se faisait-il ?

       La jeune femme fronça les sourcils, mais aucune réponse ne lui vint à l'esprit. Qu'importe. Elle était libre maintenant et son mécène lui avait donné de quoi vivre. Une vive excitation s'empara d'elle. Elle allait connaître le monde extérieur. Voyager, partir, loin d'ici. Une destination en particulier lui vint en tête. Un pays qui l'avait intrigué. Oui, c'est ici qu'elle se rendrait d'abord !

       Sa rêverie cessa lorsque le bruit de sirène lui parvint aux oreilles. Elle était posée sur une roche haute. Que se passait-il en contrebas. Discrètement, elle s'approcha du bord et se pencha pour découvrir avec stupéfaction de hautes flammes puissantes caressant le sable, dégageant une fumée noire inquiétante. Avait-elle fait ça ? Si tel était le cas, alors, elle devait fuir et vite. Mais d'abord, elle se débarrassa de ses haillons et enfila le jean et le haut qui se trouvait dans son sac. Elle enfila des baskets puis, rapidement, courut sans savoir où aller. Elle finirait bien par trouver de l'aide quelques parts.

     


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  •   

       La jeune femme attendait à l'aéroport, son maigre bagage collé contre elle. Depuis qu'on l'avait laissé seule, elle était restée dans cette position prostrée sur son siège, à attendre que son vol soit annoncé. On lui avait tout expliqué : la compagnie qu'elle devait prendre, l'heure de décollage, ce qu'elle devait faire pour passer la sécurité. Tout. La personne qui l'avait accompagné ne s'en était peut-être pas rendu compte, mais elle l'avait aidé à prendre un nouveau départ.

       Elle ignorait encore combien de kilomètre, elle avait parcouru avant d'atteindre une petite ville entourée par les sables. Elle ignorait encore combien de kilomètre, elle avait parcouru avant d'atteindre une petite ville entourée par les sables. C'était à peine si on pouvait voir le bitume. Elle avait cessé sa course, allaitante, suante et surtout assoiffée et peut-être, même, affamée. Cette personne, cette Kim, elle l'avait rencontré quelques jours plus tôt après avoir longuement couru dans le désert. Sa nuque la tirait, la chauffait, au même titre que ses bras, que son nez. D'étranges sensations nouvelles. En passant depuis la vitrine d'un garagiste, elle avait aperçu une jeune femme décoiffée, mal habillée, la peau rougit. Il lui avait fallu un certain temps avant de comprendre qu'il s'agissait d'elle. Pour la première fois, elle s'était vue dans ce nouveau corps, cet amas de chair qui faisait d'elle une personne comme toutes les autres.

       Puis, une jeune femme, derrière elle l'avait interpellée :

    -Hey ! Est-ce que ça va ?

       La cendrillon s'était retournée, les yeux hagards, effrayée par ce qui allait bien pouvoir arriver. C'était la première qu'elle pouvait interagir avec un humain, sans que celui-ci la voie comme une créature. Cette personne était libre de lui parler, de lui répondre, de l'écouter. Elle avait senti son corps légèrement trembler d'appréhension ou bien, était-ce à cause de sa course effrénée quelques minutes plus tôt ? Quoiqu'il en soit, elle était restée muette, le regard sur la personne qui venait de l'interpeller.

    -Tout va bien ?, avait-elle encore demandé tout en se rapprochant de l'étrangère.

       Elle l'avait à peine touché que tout son corps se laissa tomber vers le sol, épuisé. Elle avait entendu des cris de secours, elle s'était sentie soulevée dans des bras musclés puis plus rien. Jusqu'à ce qu'elle se réveille dans une chambre fraîche où veillait cette même personne qui lui avait parlé. À partir de cet instant, les choses s'étaient enchaînées sans qu'elle ne s'en rende compte. Elle s'était présentée sous le nom de Kukki Smith. Kukki était le nom que lui avaient donné Alaïs et Hector durant sa toute jeune enfance. Elle ignorait encore d'où leur était venue cette idée. Quant au nom Smith, elle avait lu dans de nombreux ouvrages ce nom de famille. Elle avait, alors, suggérer que c'était un nom de famille assez commun. Incertaine des événements qui l'avaient poussé à fuir, elle préféra jouer la carte de l'amnésie partielle. Elle avait déclaré ne pas se souvenir de la raison de sa course jusqu'ici, mais, en revanche, elle se souvenait qu'elle voulait partir pour le Japon.

       Bien entendu, la somme astronomique qui se trouvait dans son sac avait soulevé aussi des questions. Elle avait justifié ce fait par une certaine parenté avec une famille très aisée. Un prétexte pour inventer une histoire supplémentaire : elle avait dû les fuir, ça aussi elle s'en souvenait, prétendument, et elle avait pris quelques billets à son père pour survivre.

    -Survivre ?! Avec tout ce qu'il y a là-dedans, tu as largement de quoi racheter la ville !

       À cela, Kukki avait haussé les épaules. Elle n'avait pas vraiment idée de ce que tout cela représentait. Elle avait toujours vécu dans un cocon. Ce qui était en partie vrai, d'ailleurs. Et il n'avait pas fallu longtemps à Kim, sa sauveuse, pour s'en rendre compte. Elle l'avait guidé pour réserver son billet d'avion, elle l'avait aidé à choisir quelques nouveaux habits, de quoi se laver, se pomponner. Sans jamais chercher quelque chose en retour. Kim avait, alors, expliqué qu'il était rare que des étrangers arrivent dans cette ville et qu'il était toujours bien mieux de se montrer charitable plutôt que pègre. Elle l'avait même emmené jusqu'à l'aéroport de San Francisco avant de repartir. Pour la remercier, Kukki avait voulu lui donner une somme généreuse, ayant entre-temps, ouvert un compte avec l'aide de sa sauveuse. Kim avait refusé. Par peur, sans doute. Après tout, elle ne pouvait pas être sûre à cent pour cent de la véracité des propos de l'étrange Kukki.

    -Mesdames et messieurs, nous invitons les passagers à destination de Narita de bien vouloir s'avancer.

       Narita ! C'était à elle. D'un mouvement vif, Kukki se leva et suivit les personnes qui se dirigeaient vers la porte d'embarquement. Elle avait tout fait et de ses liasses, il ne restait maintenant qu'une petite carte dorée bien cachée dans ses habits neufs. Arrivée devant l'hôtesse, elle tendit son billet d'avion ainsi que ses papiers d'identité qu'elle avait trouvé caché au fond de son sac au cours de son séjour dans la petite ville près du désert. Ça avait été un soulagement de voir que ces faux papiers étaient bels et biens au nom de Kukki Smith et pas de quelqu'un d'autre. Elle avait également découvert qu'elle avait une double nationalité : américaine et japonaise. Elle était, au dire de Kim, une hāfu, une métisse. Les choses semblaient se dérouler de manière étrangement facile, mais Kukki décida d'ignorer ce fait.

    -Bon voyage, madame Smith.

       L'hôtesse lui adressa un sourire des plus professionnels, presque convainquant auquel la jeune femme répondit avant d'avancer. Quelques longues minutes plus tard, son avion décolla.

     

       Le jeune homme passa à travers une sorte de trouée invisible, s'étalant de tout son long sur le sol. Sur son visage, on pouvait y lire de la colère, mais aussi un peu de douleur.

    -Foutu mew-mew !, pesta-t-il en se relevant.

       Une fois debout, il se tint les côtes, inspirant profondément dans l'espoir de faire passer la douleur. Il allait encore devoir déranger son frère aîné pour qu'il lui applique quelques soins. Cette idée ne l'enchantait pas du tout, car avant cela, il savait qu'il allait devoir essuyer quelques remontrances. Oui, il était encore parti tête baissé vers la confrontation ! Mais cette stratégie fonctionnait bien avant. Oui, avant que ces filles étranges n'arrivent, personne n'avait trouvé quoi que ce soit à redire sur sa manière de faire. Il soupira. Pai avait peut-être raison. Il fallait qu'il se fasse à l'idée qu'à partir de maintenant, il était plus prudent d'agir de manière plus stratégique. La première partie de leur plan avait fonctionné après tout. Jour après jour, des milliers d'humains périssaient. Mais pas assez vite au goût de Kisshu. Alors, plutôt que d'attendre sagement que ce virus anéantisse l'humanité tout entière, il avait préféré s'occuper et le Deep Blue, leur chef, n'avait rien trouvé à redire. Il semblait, bien au contraire, encourager ses deux autres frères à en faire de même.

       D'un pas difficile, le jeune homme s'avança jusqu'à atteindre une vaste salle où étaient affichés de nombreux écrans de tailles différentes. Au milieu, se trouvait son frère aîné, accompagné de leur benjamin, Tart. Ils discutaient, mais s'interrompirent en le voyant arrivé.

    -Kisshu !, cria le plus jeune en ce dirigeant rapidement vers son frère.

    -Ce n'est rien !, répondit celui-ci d'un ton sec et agacé.

       Un peu plus loin, Pai s'était également avancé, mais il était bien moins alarmé que le plus jeune. Kisshu pouvait même constater dans son regard, l'once d'une certaine satisfaction. Il lui avait conseillé, à mainte reprise, de patienter encore un peu avant de repartir au combat. Mais le cadet des trois frères n'était pas de ceux qui attendaient sagement. Il préférait la pratique à la théorie. Et c'est bien cela qui le distinguait de ses deux frères ou plutôt demi-frères. Comme de nombreux autres enfants de sa planète, Kisshu avait perdu ses parents biologiques dans un glissement de terrain fatal. Les parents de Pai et Tart, témoins de la tragédie, avaient pris le jeune enfant avec eux. Si sa relation avec Tart était plutôt correcte, les choses étaient plus compliquées Pai. Ça l'avait toujours été. Ils étaient le jour et la nuit. La réflexion et l'action. L'introverti et l'extraverti. Tous les opposaient et leur relation était souvent compliquée. Malgré tout, Pai avait pris son rôle de grand frère à cœur et protégeait au mieux son cadet au même titre que leur bien plus sage jeune frère.

    -Je t'avais prévenu, déclara Pai d'un ton calme.

    -La ferme, répondit le cadet d'un ton exaspéré. Épargne-moi ton laïus, veux-tu ? Je voudrais plutôt que tu trouves quelque chose pour soulager la douleur.

       L'aîné se tut et continua d'avancer vers le blessé. D'un geste expert, il ordonna à son frère de retirer sa main de ses côtes pour examiner l'hématome qui avait commencé à se former.

    -Elles n'y sont pas allées de main morte cette fois, constata-t-il

    -Elles sont plus nombreuses que lors de leur dernier affrontement. Je pensais rallier la dernière à notre cause mais...

    -Ce n'est pas plus mal, déclara Pai après une rapide réflexion silencieuse. Nous n'aurions pas pu lui faire confiance. Suis-moi.

       Kisshu ne répondit rien et obéit à son ainé, la mine boudeuse. Si Pai n'était pas de son avis, le cadet souhaitait, malgré tout, persister. La présence d'une mew-mew dans leur camp - l'une des plus puissantes, à en juger par son hématome – affaiblirait le moral de leurs ennemies si sensibles. Cependant, il préféra garder cette réflexion pour lui-même.

    -C'est étonnant. J'aurais pensé que tu te serais démené pour la première mew-mew. C'est quoi son nom déjà ?, intervint Tart qui suivait ses aînés. Ichi...Gochi...

    -Ichigo, répondit enfin Kisshu sans cacher son agacement. Elle s'appelle Ichigo.

    - Dis-donc ! Ce que tu es susceptible quand il s'agit d'elle, constata le benjamin en croisant ses bras.

       Ignorant la remarque du plus jeune, l'alien aux cheveux verts s'assit sur une chaise près de laquelle se trouvait une table où était posées diverses bandes et pommades. Il laissa Pai lui appliquer le baume froid sur ses côtes, réprimant une grimace de douleur.

    -Tu ne devrais pas trop t'enticher de cette humaine, intervint calmement l'aîné tandis qu'il attrapait une bande. Elle est ennemie. Nous devrons l'éliminer tôt ou tard. Tu ne peux pas te permettre de te laisser aller à tes sentiments.

    -Qu'est-ce que tu racontes ? Je n'ai pas le moindre sentiment à l'égard de cette humaine. C'est une occupation, rien de plus. Lorsque je m'en serai lassé, je la tuerai. Elle et son insupportable petit copain.

       Pai n'était pas tout à fait convaincu par les mots de son cadet. Lui-même ne l'était peut-être pas, d'ailleurs mais il préférait ne pas l'admettre, pour le moment. Ce lien qu'il miroitait, qu'il désirait tant avec cette ennemie compromettait la réussite de leur mission. Pai et Tart devraient bientôt intervenir pour lui prêter main forte, pour qu'il ne dévie pas de leurs objectifs. La survie de leur peuple en dépendait.

       Le jeune homme attendait l'arrivée imminente des passagers, un petit panonceau où était écrit le nom de la jeune femme qu'il venait accueillir, dans ses mains. Mentalement, il se répétait ce qu'on lui avait demandé de lui dire. Il ne devait pas se tromper sinon son supérieur en serait fâché. Sa punition serait fatale. Même si, connaissant monsieur Saibhir, il finirait bien par mourir, lui aussi. Tout comme cette pauvre Kim qu'il avait dû abattre quelques heures plus tôt.

       Son employeur était un être cruel et froid. La pauvre jeune femme s'était portée volontaire dans cette mission dans l'espoir de revoir sa pauvre mère. Bien entendu, Hector Saibhir ne lui avait rien dit du sort d'Alaïs. Il avait ordonné sa mise à mort alors que sa fille n'avait que quinze ans. En pleine adolescence, effrayée et attristée par la disparition de sa mère, elle s'était volontiers réfugiée dans les bras paternels du bienfaiteur milliardaire. Au grand dam du jeune homme qui l'avait suivi. Il connaissait la réputation de Saibhir. Il savait qu'à l'instant même où Kim était entré dans la demeure du nanti, elle s'était condamnée, s'abreuvant des mensonges et des promesses de son protecteur.

       Mais Tae avait espéré que les choses se passeraient autrement. Qu'il réussirait à sortir son amie du joug de ce dangereux individu. En vain. Elle avait voulu rendre service à l'homme qui l'abritait depuis la disparition de sa mère. Elle avait voulu démontrer sa gratitude. Et le cruel l'avait remercié en demandant à son plus jeune homme de main de l'abattre. Mais loin de lui ! Oh, ça oui. Il ne fallait pas qu'il voie les yeux mourants de la petite Kim le fixer, n'est-ce pas ? Tae avait été contraint de suivre la jeune femme jusqu'à sa chambre, en silence. Lorsqu'il était entré, Kim lui avait offert son plus beau sourire. Quelle avait été magnifique à ce moment-là. Jusqu'à ce qu'une balle létale abîme son joli front, jusqu'à ce que son cerveau cesse, d'un coup de fonctionner, au même titre que son cœur. Jusqu'à ce que son liquide vital imbibe le tapis sur lequel elle était allongée.

       Elle avait été sa première victime. Son amie, sa chère amie qu'il aimait tant. Pourquoi s'était-il exécuté ? Seul dans l'aéroport, Tae luttait pour ne pas glisser à nouveau dans une folle détresse. Il s'entendait encore à crier tandis qu'il serrait le corps sans vie de son amie. Ah oui ! Pour sûr, Saibhir avait tenu sa promesse. La mère et la fille étaient maintenant réunies. Du moins, il fallait l'espérer.

       Son supérieur était arrivé, suivit de plusieurs hommes équipés du nécessaire pour nettoyer toute trace de cet acte. Habitué des meurtres ordonné par son maître après plus de dix ans de service, Ryan ne s'était même pas émeut de la détresse du jeune homme. On lui retira le corps de Kim de ses bras, on le releva avant que Ryan ne lui inflige une claque bien sonore sur sa joue humide. Il fallait qu'il se reprenne. Ce sacrifice était nécessaire et Saibhir avait ordonné à ce qu'il parte au plus vite rejoindre le terminal de l'avion de Kukki. Un jet privé l'attendait. Le plus rapide du monde connu, secret de tous, sauf de ses hommes. Eux aussi mourront. Oui, quoique Tae ait pu imaginer à l'époque, il s'était fourvoyé. Une fois au service d'Hector Saibhir, la seule issue était la mort.

       La douce musique de l'aéroport le sortit définitivement de ses pensées. Les passagers arrivés et parmi eux, il y avait sa cible. Collé à la barrière, il regarda attentivement les voyageurs passés devant lui, jusqu'à ce qu'une jeune femme aux cheveux bleu marine et aux yeux améthyste se dirige vers lui, intriguée.

    -Madame Smith ? demanda-t-il d'une voix neutre.

       D'un hochement de tête, la jeune femme confirma son identité. Elle resta silencieuse, mais la question qui brûlait ses lèvres était comme inscrite dans ses jolis yeux.

    -Je suis envoyé par votre père, monsieur Hector Smith. Il souhaitait s'acquitter de la promesse qu'il vous a faite avant que vous ne partiez. Une voiture nous attend à la sortie de l'aéroport pour nous emmener dans votre nouvelle demeure.

       Elle ne semblait pas comprendre. Pourtant, c'était bien ce qu'il avait à dire non ? Il devait improviser.

    -Vous ne vous souvenez pas ?

    -Ma mémoire me fait un peu défaut en ce moment monsieur, je suis désolée, répondit-elle enfin.

    Pris au dépourvu, Tae ne sut quoi répondre. Allait-elle le suivre, malgré tout ? Ils restèrent à se regarder quelques instants, gênés de la situation, jusqu'à ce qu'enfin Kukki Smith passe en dessous de la barrière – au lieu d'en faire le tour – pour rejoindre l'homme de main de son père.

    -Mais si vous dîtes que c'est mon père qui vous envoie, je ne vois pas de raison de refuser. Je vous suis.

    Ce ton candide, ignorant. Il ne le connaissait que trop bien. C'était le même que celui de Kim. Elle aussi, visiblement, était victime de l'emprise de Saibhir. Mais il ne montra rien de ses pensées et s'exécuta tel un bon soldat. Il l'escorta jusqu'à une berline aux vitres teintées, lui ouvrit la portière et la suivit, silencieux. Elle avait refusé de se défaire de son maigre bagage. Alors, il n'avait pas insisté et avait laissé le silence s'installer à nouveau entre eux.

    -Vous parliez d'une demeure ? lança-t-elle en fixant la route.

    Il n'était pas difficile de deviner son trouble. Sa voix, sa posture, tout le montrait.

    -Monsieur Saibhir souhaite que vous soyez installé au mieux dans le pays. Il a même fait appel à un professeur particulier pour vous apprendre la langue locale si...

    -Ce ne sera pas nécessaire, coupa-t-elle de sa voix douce. Je comprends et parle cette langue.

      Un don qu'elle avait découvert au cours de son vol. À côté d'elle, un natif revenait dans son pays après de très courtes vacances aux États-Unis. Elle ne s'en était pas rendu compte, dans un premier temps. Jusqu'à ce qu'une hôtesse passe pour proposer à elle et à son voisin des rafraîchissements. L'homme avait demandé s'il y avait du thé de disponible, mais l'employée n'avait pas compris un traître mot de ce qu'il avait dit, demandant à plusieurs reprises qu'il se répète plus lentement. Kukki en avait été surprise. Et elle le fut plus encore lorsque son voisin indiqua également qu'il ne comprenait pas tout à fait. Elle crût, un instant, devenir folle. Alors, pour mettre un terme à cette scène rocambolesque, elle avait passé commande pour l'homme assis à côté d'elle.

    -Vous comprenez le japonais ?, avait-il demandé après que l'hôtesse parte pour continuer à prendre les commandes.

      Une question étrange. Pour elle, il n'y avait pas d'autres langues. Il avait bien un accent, peut-être, mais léger. Elle avait lu qu'il existait de nombreuses langues dans ce monde, mais jamais elle n'avait imaginé pouvoir les comprendre aussi distinctement.

    -Et bien, oui, je pense, avait-elle répondit avec un petit sourire poli.

    -Oh ! Et vous le parlez très bien aussi. C'est agréable d'entendre un peu de ma langue maternelle avant de revenir sur ma terre natale, vous savez. Vous venez visiter le Japon ?

       L'homme avait été si heureux qu'ils avaient discuté tout le trajet durant avant de se séparer durant leur descente. Kukki avait expliqué qu'elle ignorait encore si elle était partie pour un peu de tourisme ou bien pour vivre dans cette contrée. Jusqu'ici, après tout, sa maison avait été un bunker souterrain, occupé par des scientifiques et des appareils complexes. Elles n'avaient pas pensé, le moins du monde, qu'elle pouvait s'installer ailleurs pour y vivre, libre. Cependant, Hector avait, vraisemblablement répondu à la question à sa place en lui offrant cette demeure qu'avait mentionné Tae. Un accord qu'ils avaient fait sans que Kukki ne s'en souvienne.

       Le trajet fut long et silencieux. Petit à petit, les habitations avaient fait place aux immenses étendus sauvages. La voiture avait ensuite pris un chemin forestier, chahutant généreusement le conducteur et leurs passagers pour enfin rejoindre un chemin moins escarpé, dallé, qui se dirigeait vers un modeste manoir.

    -Nous voici arrivé, madame Smith, l'informa Tae.


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  •    Un grand bruit de verre brisé se fit entendre suivit par le bruit final d'une chute dans l'herbe. Le corps qui reposait maintenant à terre rougissait l'herbe verdoyante tandis que les derniers spasmes de vie s'estompaient. Des cris graves continuèrent de déchirer le silence du manoir perdu en forêt, ainsi que des coups de feu tirés par plusieurs hommes en direction d'une seule et même cible. Les hautes fenêtres de la demeure laissaient entrevoir leur avancée hésitante face à une silhouette menue et immobile. Aucune balle ne semblait l'atteindre, s'écrasant plus en arrière sur une peinture imposante d'un homme puissant. Bientôt, le tableau se décrocha de son support, provoquant une légère secousse sur le parquet de bois. Le signal qu'avait choisi la jeune femme pour répliquer.

       À une vitesse insoupçonnée, elle se dirigea vers ses ennemis. Ces hommes employés par celui qui était le plus proche d'une figure paternelle. Ils n'avaient pas été engagés pour la protéger, mais pour la surveiller. Son amnésie n'avait été que temporaire. Tout lui revenait à présent : les cris, la colère, l'homme qui l'avait pris dans ses bras tandis qu'on abattait l'un des siens. Les expériences qu'elle avait subies, la douleur tant physique que psychologique qui l'habitait. Cette sensation d'injustice, cette envie de vengeance. Tout lui était revenu le matin même alors qu'un étrange correspondant lui avait fait parvenir une clé USB sobrement décorée d'un noir mât accompagné d'un mot sans signature :

       Souviens-toi.

      Elle avait visionné le contenu trois fois avant d'accepter les diverses images et vidéos que la clé contenait. Lorsqu'elle avait détaché son regard de l'écran de son ordinateur, tout lui semblait plus lucide. La lueur étrange de cette innocente peluche, la manière dont les fleurs, chaque jour avaient été déposées, ce fond factice dans un des tiroirs de sa commode, la gentillesse des employés de cette maison, mais aussi la manière qu'ils avaient de l'éviter, de ne jamais la regarder dans les yeux, comme avant, dans sa première demeure, bien sous terre.
    À nouveau, la colère la gagne, tandis que l'enregistrement vocal de son dernier échange avec Saibhir résonnait dans sa chambre.

    -Laisses-moi partir, disait-elle

    -Je ferais ce que tu voudras, ma fille. Mais avant, j'aimerais partager avec toi une dernière tasse de thé...



       Plus un bruit, puis son soupir tandis que son corps glissait de sa chaise, inanimé. Les dernières injonctions de Hector Saibhir puis plus rien. Il avait ordonné à ce qu'elle soit déposée dehors avant l'arrivée des autorités. Voilà pourquoi elle ne se souvenait de rien. Pour sa transformation physique, en revanche, elle n'avait eu aucun indice.

       Saibhir lui avait menti et avait gardé sous sa coupe son expérience de vingt-et-une années. Il se servait encore d'elle pour s'enrichir. Elle le savait, maintenant. Tournant, d'abord, en rond comme un lion en cage, elle avait fini par sortir de ses appartements, laissant la colère l'envahir. La servante qui croisa son chemin n'eut pas la chance de se défendre. C'était à peine si elle avait eu le temps de comprendre. Le premier corps sans vie s'écrasa sur le tapis rouge du manoir, imbibant les fibres du liquide vital, suivit de près par deux autres : un homme de la sécurité et celui qui prétendait être un majordome. L'alarme fut rapidement lancée tandis que la jeune femme arrachée et détruisait tout objet muni de micros ou de caméra. Les bris de porcelaine, les pétales de fleurs et les bois détruits baignèrent bientôt dans le sang des premières victimes. Et cela n'avait été que le début d'une longue bataille qui s'apprêtait à prendre fin tandis que Kukki se dirigeait vers les derniers hommes debout. Dans sa course, elle se promit de repartir racheter une demeure, loin de Saibhir. Quelque chose de plus simple, de moins grand, de plus discret. Quelque part en ville. À Tokyo, peut-être ?

      Le dernier ennemi vint s'écraser au sol, mélangeant avec les autres son sang dans l'immense flaque que ne pouvait plus absorber le tapis ou le bois. Seule la chambre de la jeune femme demeurait intacte. Elle en avait fait le choix délibéré. Pleine de sang, elle reprit ses affaires puis se dirigea vers la salle de bain afin de se débarrasser de la souillure qui couvrait sa peau. Quand elle en ressortit, il était difficile d'imaginer le carnage qui venait d'être accompli. Elle attrapa la lanière de son sac précieux où reposaient encore, ses faux papiers et les billets que lui avait glissé Hector. De l'argent sale, sans aucun doute, mais utile, malgré tout, pour commencer une nouvelle vie, loin de lui et de ses sbires. Avant de fermer définitivement la porte, elle posa un regard noir et effrayant en direction de la peluche qui reposait au milieu de son lit. Un message à l'attention de l'espion qui l'observait sûrement. Quelques minutes encore s'écoulèrent avant que le bruit lointain de la porte principale se fermant ne résonne jusqu'à la chambre.

      Quelques secondes encore à peine, un incendie se déclara dans la demeure. Il fut si gigantesque qu'il fallut, d'après les journalistes curieux venus rejoindre le lieu de la tragédie, toute une nuit pour le maîtriser entièrement. Des corps, il n'en restait rien. De la demeure, persistait encore quelques murs grisés de cendre. Où avait eu lieu de départ des flammes ? Qui habitaient ses murs ? Personne ne put le dire.

       Au loin, un badaud pas comme les autres avait rejoint la foule, spectateur. Un léger sourire étirait ses lèvres fines. Son plan avait fonctionné. Kukki et lui s'étaient débarrassés du joug de Saibhir, pour toujours. Il venait d'entamer la première étape de sa vengeance pour Kim et les autres. Lorsqu'il fut certains que rien ne pouvait inculper la jeune femme ou même, lui, Tae fit demi-tour et rejoignit une voiture berline aux vitres teintées dont le moteur était allumé. D'un pas léger, il prit place côté conducteur et se tourna vers la jeune femme assise devant lui, tenant fermement son sac.

    -Il n'y a plus rien à craindre, mademoiselle.

       Elle laissa échapper un soupir tandis que ses épaules s'allégeaient d'un fardeau bien trop pesant.

    -Où allons-nous, maintenant?, demanda-t-elle.

    -Je vous l'ai dit, non ? Je vous ai promis de vous amener jusqu'à Tokyo et de vous aider à construire une nouvelle vie, loin des frasques de monsieur Saibhir.

    -Pourquoi ? Pourquoi faites-vous cela pour moi, Tae ? Pourquoi m'avoir révélé cette partie de ma mémoire qui me manquait ? Que gagnez-vous dans cette histoire ?

       Un instant de silence s'installa entre les deux jeunes gens tandis que Tae, les yeux fixés dans les améthystes de Kukki cherchait à son tour la réponse à ces questions.

    -La vengeance et la justice. Vous et moi sommes victimes d'un homme ô combien trop puissant et dangereux pour ce monde en décrépitude.

       Ne trouvant rien à redire, Kukki hocha la tête d'approbation et laissa Tae conduire à travers la forêt, loin de cette demeure dans laquelle il l'avait lui-même accompagné quelques jours auparavant.

       Le signal avait été fort, à mesure que la journée avançait, puis il avait disparu, comme si rien ne s'était passé. Puis les sirènes des pompiers avaient retenti à travers toutes les rues de la ville, se rejoignant à un même point où, dorénavant, crépitait un feu léchant les murs d'une demeure somptueuse. En quelques heures, il n'en restait presque rien et aucune explication n'avait pu être formulée. Ce ne pouvait pas être une coïncidence. Le signal s'était apparenté à celui des aliens ennemis. L'un d'eux, avait-il subi un spasme de pyromanie ? Keiichiro n'en était pas certain, tandis que Ryô continuait son laïus d'inquiétude, allant et venant d'un bout à l'autre de la pièce éclairée par l'écran puissant de l'ordinateur.

    -Nous devons trouver, à tout prix, ce qui a causé cet incendie. C'était peut-être un test de la part de l'ennemi. Ils mijotent peut-être quelque chose de plus grand. Les filles doivent se préparer à combattre les éléments, elles doivent s'entraîner. Nous devrions peut-être...

    -Ryô, coupa l'ainé des deux hommes en attrapant le poignet du cadet, je doute qu'il s'agisse d'un acte de nos ennemis.

    -Mais tu as vu comme moi le signal qui a été émis.

    -Il était différent des autres.

      Le blond se détacha de la poigne de Keiichiro, émettant un grognement agacé. Il avait raison, bien sûr. Mais son esprit refusait d'accepter de n'avoir aucune autre explication que la simple idée d'un acte ennemi. Pai, Kisshu et Tart n'avaient jamais commis d'acte de ce type. Ce n'était clairement pas leur manière d'agir. Mais peut-être que lui et Keiichiro s'étaient trompés, après tout. Peut-être, qu'en plus de vouloir polluer plus encore la planète Terre afin d'exterminé l'humanité qui y vit, ils avaient décidé de mettre le monde à feu et à sang.

       Non, c'était idiot de penser ça. Il fallait se rendre à l'évidence : le signal qui avait été émis sur leur radar était, encore à ce jour, inconnu. Plus encore, il avait disparu quelques minutes seulement après avoir commencé à émettre. Ce n'était peut-être rien. Une simple défaillance.
    Les épaules de Ryô s'affaissèrent à mesure qu'il se raisonnait. Son rythme cardiaque s'apaisa. Il finit par se rasseoir sur son siège, au côté de son ainé. Keiichiro continuait à regarder fixement l'endroit précédemment illuminé. Lui aussi ne comprenait pas, mais ce n'était clairement pas devant un écran qu'ils trouveraient une réponse à cette énigme.

    -Dois-je envoyer les filles ? , demanda le plus jeune.

    -J'ai peur que nous leur fassions perdre du temps inutilement, répondit l'ainé sans détacher son regard de l'écran.

    -Elles peuvent simplement inspecter, voir si leur sixième sens réagit à un danger ou à quelque chose qui pourrait justifier ce signal.

      L'homme aux cheveux châtains soupira, fermant ses yeux, tandis qu'il penchait sa tête en arrière. Ils n'avaient pas vraiment le choix. Ils ne pouvaient pas se permettre de simplement ignorer ce qui venait d'arriver. Les enjeux étaient trop grands pour laisser passer la moindre anomalie.

    -Je vais préparer quelques gâteaux pour leurs retours, dans ce cas, conclut Keiichiro en se levant de sa chaise.

       Ryô le regarda passer la porte de la pièce pour remonter à la lumière du café de couverture qu'ils avaient ouvert. L'aîné avait pris cette fâcheuse habitude de cuisiner des mets délicieusement sucrés pour leurs guerrières en guise de récompenses pour leur travail acharné. Une habitude qui risquerait de devenir mauvaise, à force. Mais le blond décida de ne pas en parler pour le moment et se détourna de la porte fermée pour contacter ses mew-mew.

     

     

       Pai resta encore un instant devant l'écran de son radar sur lequel était affiché une vue détaillée de la ville de Tokyo. Bientôt, espérait-il, lui et ses frères pourraient se focaliser sur la ville, sur l'Eurasie et enfin, la planète toute entière. Mais pour l'heure, il devait encore soumettre la capitale japonaise et se débarrasser de la menace ennemie. Cependant, ce n'était pas les mew-mew qui le tracassait, ni l'espoir d'une réussite à venir. Un point rouge s'était dessiné quelques minutes sur l'écran bleuté alors qu'il s'apprêtait à partir se reposer. Kisshu et Tart n'avaient rien pu voir : ils étaient déjà partis dans les bras de Morphée. Mais lui, avait été témoin de ce phénomène et une interrogation persistait. Qu'est-ce que son radar avait pu détecter ? Il était resté quelques instants sans rien faire, espérant qu'à nouveau, le point rouge réapparaisse. Puis, lorsqu'il comprit qu'il ne reviendrait pas, il décida de focaliser le radar sur son lieu d'apparition : des arbres denses au milieu desquels se dessinait une trouée calcinée et encore fumante. Des humains se regroupant derrière un bandeau rouge et blanc tandis que d'autres en uniforme lançait des gerbes d'eau en grande quantité sur quelques langues enflammées. Pourquoi son radar avait-il réagi à un incendie ? Ses frères et lui en avaient déjà provoqué ici et là, de manière éparse avant de préféré une attaque plus mesurée et de plus grande amplitude. Jamais l'écran-radar n'avait réagi de la sorte. Il se passait quelque chose. Mais était-il prudent d'y aller sans prévenir Kisshu et Tart ? Ils étaient une équipe, après tout et l'aîné avait toujours désapprouvé la mauvaise manie de son cadet à agir seul. Comme une réponse à lui-même, il s'étira et bailla de fatigue. Le matin se levait sur Tokyo. Il fallait qu'il dorme, au moins un peu.

       Il s'apprêtait à se résoudre à cette idée quand, finalement, alors qu'il commençait enfin à se mouvoir, il lui prit l'envie de prendre l'air. La curiosité était trop grande. Il n'en aurait pas pour longtemps. Sans plus attendre, il se téléporta, laissant la pièce déserte et silencieuse.

       Il réapparut quelques instants plus tard aux abords de la clairière calcinée. Les humains se dispersaient, le lieu était presque désert. D'un pas prudent, il s'engagea derrière un mur encore chaud des flammes qui l'avait envahi et s'agenouilla pour analyser l'herbe humide et grisée. Il ignorait ce qu'il cherchait : un peu de tout. Une présence ennemie, la présence d'un mew-aqua, quelque chose qui pourrait l'intéresser. Mais son instinct affûté ne trouva rien. Alors il se déplaça ailleurs, un peu plus au milieu des décombres, tandis qu'un camion rouge démarrait et que les derniers curieux disparaissaient sur le chemin forestier. Il ne restait vraiment plus rien du bâtiment qui s'érigeait en ce lieu. Du bout des doigts, il continua à caresser l'herbe puis le reste de vieux plancher et enfin, les murs mouillés. Il n'y avait rien, il ne ressentait rien. Jusqu'à ce que ses doigts passent dans le creux de deux pierres. Une sensation étrange et étonnante. Ses yeux se fermèrent tandis que de violentes images lui venaient à l'esprit. Il entendit des cris, ressentit de la colère, du désespoir et de la rage tandis qu'une main inconnue saisissait avec force le cou d'un humain.

       La vision cessa aussitôt, mais les sensations qu'avait ressenties Pai persistaient. Qu'est-ce qui avait bien pu lui provoquer ça. Il repassa encore ses doigts entre les pierres, à la recherche d'un objet quelconque – bleu de préférence – mais il ne vit rien d'autre que le gris du minéral taillé et envahit de cendre mouillée.

       Ses yeux commencèrent à piquer, ses paupières à s'alourdir. Il était temps qu'il rentre. Il reviendrait plus tard en compagnie de ses frères. Mais alors qu'il s'apprêtait à partir, il entendit des voix lointaines qu'il ne connaissait que trop bien. Ses ennemies s'étaient également rendues sur ce lieu. Il cru, alors, qu'il y avait bel et bien quelque chose et son sens du devoir lui dictait de le trouver avant les mew-mew.

    -Qu'est-ce que tu fais ici ?, demanda l'une d'elle en le menaçant de son arme en forme de cœur.

       Ichigo Momomiya, féline en tenue rose et chef du groupe ennemi était entourée de ses acolytes, elles aussi en positions offensives. Pai ne répondit pas tout de suite en analysa la situation, prenant en compte son état de fatigue et celui bien trop flagrant de ses ennemies. Chacune d'entre elles affichait une mine gonflée d'un sommeil coupé. La benjamine ne se gênait même pas pour bâiller et se frotter les yeux devant lui.

       Imbéciles

       Si un combat devait avoir lieu, il aurait sans doute toutes ses chances. Il n'était pas à sa première nuit blanche. Le sommeil profond était un fait rare chez Pai. La faute à son instinct de survie aiguisé dans le monde hostile où son peuple vivait. L'adrénaline l'aidant, il sentit tout son corps retrouver ses capacités. Malgré tout, les hostilités n'avaient pas commencé et avant de se battre, l'aîné des aliens trouva plus sage de discuter.

    -Je suis venu voir quelque chose, répondit-il d'un air détaché.

    -C'est vous, n'est-ce pas ?, continua féline rose. C'est vous qui avez provoqué tout ça ?! Qu'est-ce que vous manigancez ?

    -Je ne vois pas de quoi tu parles, répliqua encore l'alien de sa voix neutre.

    -Est-ce vous qui avez provoqué cet incendie ?, intervint Zakuro Fujirawa, l'ainée du groupe.

       Elle s'était avancé au-devant d'Ichigo, son fouet sorti et menaçant, prêt à attaquer si Pai montrait quelques signes d'hostilités. L'alien la regarda droit ses yeux améthyste. Il les trouvait agréables à regarder et le caractère froid, mais explosif de la mew-mew lui plaisait plutôt assez. Sans parler de sentiment amoureux – prohibé en ce temps de conflit – Pai portait un grand respect à l'égard de la jeune femme aux oreilles de louves dont elle portait l'ADN. Il comprenait tout à fait la volonté qu'avait eue Kisshu à l'amener au sein de leur groupe. Elle aurait fait une alliée de poids. Cependant, elle restait une humaine et donc, de ce fait, une ennemie à éliminer.

    -Non, nous n'y sommes pour rien, répondit-il après quelques secondes de silence. Mais il semblerait que quelque chose ait été signalé ici.

       Donner une information pour en obtenir une autre. C'était un stratagème assez risquer mais efficace.

    -Visiblement, répliqua Zakuro d'une voix lente et méfiante.

    - En-tout-cas, pas le moindre signe de danger ou de mew-aqua, lança la mew-mew aux caractéristiques volatiles.

       Minto Aizawa, Retasu Midorikawa et Pudding Fong – les trois autres mew-mew – s'étaient dispersées silencieusement au cours de l'échange qu'avait eu l'alien avec les deux autres. Pudding, sautait d'un mur à un autre, tandis que les deux autres analysaient ce qu'il restait encore alentours. Pai, jusqu'ici, n'était pas entièrement certain de son hypothèse, mais il soupçonnait ses ennemis d'avoir la capacité à réagir au mew-aqua. L'intervention de Minto le lui avait confirmé. Au moins, même s'il ne savait pas ce qu'il s'était passé ici, il pourrait repartir avec de nouvelles informations.

    -Et cet incendie n'a laissé aucun indice, intervint à son tour la jeune Pudding d'un ton maussade.

       Visiblement, aucun des deux camps n'arrivait à comprendre ce qui s'était passé ici. Pourtant, ils étaient présents en ce même lieu. La vision de Pai lui revint à l'esprit et un léger frisson parcourut l'entièreté de son échine. Quoique cela ait bien pu être, le phénomène avait été assez puissant pour que les deux camps s'en intéressent.

       Un cri de surprise arracha à nouveau Pai de ses pensées. Elle venait en direction d'un mur, non loin de là où se trouvaient Zakuro, Ichigo et lui. Il s'agissait sûrement de Retasu  Ses alliées, elles aussi surprises, coururent en sa direction, en alerte. Pris par le mouvement, l'alien se surprit à les suivre et, tout comme elle, il fut surpris de retrouver la jeune femme agenouillée et en pleurs, tenant l'une de ses mains, les yeux exorbités d'horreur.

    -Tout ce sang, chuchota-t-elle entre deux sanglots.

       Pai fronça ses yeux, quelque peu déboussolé. Avait-elle eu une vision similaire à la sienne ? Spectateur de la scène, un peu en retrait, il vit Zakuro s'approcher de la jeune femme en tenue verte et poser une main compatissante sur son épaule. Retasu se jeta presque aussitôt dans les bras de l'aînée, racontant l'horreur dont elle avait été témoin et confirmant les soupçons de Pai. Comment avait-elle eu cette vision ? Elle ne sut pas le dire. Quoiqu'il en soit, un événement avait bien eu lieu entre ses ruines fumantes, suffisamment horrible pour être signalé auprès des deux camps.

       Zakuro voulut se tourner vers Pai pour savoir quelque chose. Quoi ? Elle ne savait pas ? Mais une réponse quelconque. Mais alors qu'elle se tournait en sa direction, elle n'aperçut que le mirage de son ennemi disparaissant vers cet ailleurs. L'ennemi était rentré et, hormis cette vision, rien n'était à signaler.


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